750 grammes
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Plume-pudding

Gastronomie

8 janvier 2007 1 08 /01 /janvier /2007 20:55

Attention : repos d'environ 1/2 journée (minimum). Il est préférable de préparer le plat la veille.


ingrédients

une douzaine de poivrons mûrs de 2 ou 3 couleurs différentes (ou simplement des poivrons rouges)
6 gousses d'ail (ou un piment séché langue d'oiseau)
huile d'olive
sel et poivre

matériel

un four
une terrine ou une boîte en plastique, avec couvercle
du papier cuisson sulfurisé (facultatif)
une planche à découper

La veille, préchauffez le four au maximum et placez tous les poivrons sur la plaque du four recouverte de papier cuisson (ou placez-les dans un grand plat allant au four). Quand les poivrons ont noirci (au bout d'un quart d'heure, voire plus), retournez-les et recommencez l'opération.


Laissez refroidir les poivrons en les plaçant sous un couvercle (la vapeur qui se dégage permet ensuite de décoller plus facilement la peau), puis pelez-les, opération fastidieuse mais incontournable. Enlevez aussi les queues et les graines.
Epluchez l'ail et coupez-le grossièrement. Si vous n'aimez pas l'ail ou que vous préférez un goût plus doux qui fait mieux ressortir la saveur du poivron, vous pouvez le supprimer et le remplacer par un petit piment langue d'oiseau séché et entier (à retirer du plat avant dégustation !) Détaillez les poivrons en lanières d'un centimètre de large environ et placez-en une couche dans le fond de la terrine. Salez et poivrez, puis recouvrez d'huile. Répétez l'opération jusqu'à ce que tous les poivrons soient placés dans le récipient. Fermez le couvercle de la terrine.
Suivant votre goût, placez le tout au moins une demi-journée (ou toute la nuit) au réfrigérateur ou bien laissez les poivrons mariner plusieurs heures à température ambiante.
Le lendemain, servez directement les poivrons dans la terrine ou en disposant les lanières dans un plat de service.

Remarque

Ce plat aux belles couleurs se dégustera sur des tranches de pain grillé ou avec un assortiment de tapas, notamment du chorizo, des aubergines frites, des boulettes de viande ou des panades. Il accompagne très bien la polenta frite (voir recette, rubrique plats et acompagnements).
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8 janvier 2007 1 08 /01 /janvier /2007 19:57
ingrédients

1 boule de pain blanc de 500 g tranchée
1 ou 2 tranches de jambon cru par personne
4 petites tomates pulpeuses
huile d'olive
sel, poivre

matériel

un grille-pain ou un four

Faites légèrement griller le pain. Frottez-le d'ail. Etalez un peu d'huile d'olive sur la même face en la répartissant bien. Frottez ensuite le pain  des moitiés de tomate, de façon à étaler toute la pulpe sur la mie. Salez légèrement et poivrez. Disposez les tranches de jambon sur le pain et servez en tapas.

Remarque

Simple et délicieux. Choisissez un jambon et une huile de qualité, et des tranches de jambon assez fines.
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8 janvier 2007 1 08 /01 /janvier /2007 16:48
ingrédients

2 douzaines d'huîtres
2 échalottes
100 g de fromage râpé
10-15 cL de crème fraîche semi-épaisse
sel
poivre du moulin

matériel

un couteau à huîtres et un torchon
un four
un grand plat à gratin

Ouvrez patiemment les huîtres sans vous couper.
Préchauffez le four en le plaçant sur position grill. Disposez les huîtres dans le plat à gratin.
Emincez finement les échalotes et répartissez-les sur chaque huître. Salez et poivrez la crème fraîche et faites de même. Terminez par une couche de fromage râpé. Enfournez et servez dès que le fromage est gratiné.

Remarques

Idéal pour découvrir les huîtres en douceur.
Quand j'étais petite, je ne pouvais pas manger ces bestioles gluantes, sauf sous cette forme. Mon père en réservait toujours une part pour "ceux qui les préfèrent gratinées". Les vrais amateurs trouveront que c'est un gâchis, mais pour ceux qui n'aiment pas trop les coquillages crus, ça vaut la peine de les goûter sous cette forme. Le jus d'eau de mer chaud est un délice, et la crème aux échalotes gratinée devrait aider ceux qui hésitent
à franchir le pas.
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7 janvier 2007 7 07 /01 /janvier /2007 16:35
ingrédients

une pâte feuilletée
une dizaine de saucisses de type knacki ou autres
de la moutarde (basique ou à l'ancienne, selon vos préférences)

matériel

four et lèchefrite
papier sulfurisé

Préchauffez le four à 200 °C.
Coupez les saucisses en tronçons de 3 ou 4 cm de long. Badigeonnez la pâte de moutarde (pas trop généreusement !). Découpez dans la pâte autant de lanières que de bouts de saucisses. Enroulez les lanières autour des saucisses.
Enfournez pour quelques minutes, en surveillant bien la cuisson. La pâte doit gonfler et dorer. Servez bien chaud.

Remarque

Des saucisses-cocktail améliorées, qui disparaissent toujours à vue d'oeil.
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6 janvier 2007 6 06 /01 /janvier /2007 18:27




Attention : la pâte doit reposer une heure

ingrédients


350 g de farine
150 g de sucre en poudre
2 oeufs
180 g de beurre doux
2 cuillers à soupe de rhum
1 sachet de levure chimique
un peu de lait ou un jaune d'oeuf
de la confiture de cerise (si possible de la cerise noire avec des morceaux de fruits)
une petite pincée de sel

matériel

1 moule à manqué assez petit (22 cm de diamètre environ)
1 saladier
1 cuiller en bois
1 verre doseur
du papier sulfurisé
1 rouleau à pâtisserie
1 pinceau de cuisine

Laissez ramollir le beurre coupé en dés jusqu'à ce qu'il soit facile à travailler. Versez la farine additionnée de sel et de levure dans le saladier. Faites un puits au milieu.
Mettez-y les oeufs, le sucre et le beurre. Travaillez la préparation à la cuiller en bois jusqu'à ce qu'elle soit homogène et ne colle plus. Ajoutez au besoin pour cela un peu de farine.
Laissez reposer la pâte une heure environ.
Préchauffez le four th 6-7 (180°C). Faites deux boules de la pâte. Découpez deux carrés de papier sulfurisé de la taille du fond du moule et abaissez-y chaque boule de pâte, pour obtenir deux ronds assez épais, de la taille du fond du moule. Placez en un (le plus épais, s'ils ne sont pas tout à fait pareils) sur son papier au fond du moule. Tartinez-le de confiture en évitant d'en mettre sur les bords de pâte. Posez l'autre abaisse par dessus, le papier vers le haut. Retirez le papier et soudez les bords du gâteau avec les doigts.
A l'aide d'une fourchette, tracez des sillons parallèles droits puis en diagonale, en gardant le même écartement entre les sillons. A l'aide du pinceau, badigeonnez le dessus du gâteau avec un peu de lait ou de blanc d'oeuf.
Enfournez pour au minimum une demi-heure (mais le gâteau peut cuire 3/4 d'heure: baissez alors le four à 150 °C). Le dessus doit être doré et croustillant et l'intérieur bien cuit (le gâteau doit résister à la pression du doigt sans s'affaisser).
Démoulez et laissez bien refroidir.


Remarque

Au moment de servir, vous pouvez proposer à part le reste de la confiture qui a servi au fourrage.
Pour varier, on peut garnir ce gâteau de crème pâtissière, de crème d'amande ou même de chocolat. Il est parfait pour accompagner un thé ou un chocolat chaud.
Ce gâteau est encore meilleur un peu rassis.

VARIANTE : FOURRAGE CREME PARFUMEE A L'AMANDE



Au lieu de fourrer le gâteau de confiture, confectionnez une crème pâtissière parfumée à l'amande amère.



ingrédients

1 jaune d'oeuf
1 sachet de sucre vanillé (ou mieux, une gousse de vanille)
75 g de sucre en poudre
1/4 de L de lait
une cuiller à café d'extrait d'amande amère liquide
une cuiller à café de marsala

matériel

une casserole
un fouet
une cuiller en bois
un récipient

Portez le lait à ébullition (si vous utilisez une gousse de vanille, grattez-en le contenu au-dessus du lait et laissez-la infuser dans le lait avant de la retirer). Pendant ce temps, battez bien le jaune d'oeuf et les sucres. Versez le lait brûlant sur le mélange puis reversez le tout dans la casserole. Placez-la sur feu moyen et remuez sans arrêt avec la cuiller en bois, jusqu'à ce que la crème épaississe bien. Laissez venir les premiers frémissements. Hors du feu, ajoutez le parfum et l'alcool, remuez. Fourrez le gâteau sans attendre le refroidissement de la crème (une pellicule se formerait sur le dessus).
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5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 15:41

Du moment que Julien fut détrompé, les longs exercices de piété ascétique, tels que le chapelet cinq fois la semaine, les cantiques au Sacré-Coeur, etc., etc., qui lui semblaient si mortellement ennuyeux, devinrent ses moments d'action les plus intéressants. En réfléchissant sévèrement sur lui-même, et cherchant surtout à ne pas s'exagérer ses moyens, Julien n'aspira pas d'emblée, comme les séminaristes qui servaient de modèles aux autres, à faire à chaque instant des actions significatives, c'est-à-dire prouvant un genre de perfection chrétienne. Au séminaire, il est une façon de manger un oeuf à la coque qui annonce les progrès faits dans la vie dévote.

Le lecteur, qui sourit peut-être, daignerait-il se souvenir de toutes les fautes que fit, en mangeant un oeuf, l'abbé Delille invité à déjeuner chez une grande dame de la cour de Louis XVI.

Julien chercha d'abord à arriver au non culpa ; c'est l'état du jeune séminariste dont la démarche, dont la façon de mouvoir les bras, les yeux, etc., n'indiquent à la vérité rien de mondain, mais ne montrent pas encore l'être absorbé par l'idée de l'autre vie et le pur néant de celle-ci.

Sans cesse Julien trouvait écrites au charbon, sur les murs des corridors, des phrases telles que celle-ci: Qu'est-ce que soixante ans d'épreuves, mis en balance avec une éternité de délices ou une éternité d'huile bouillante en enfer? Il ne les méprisa plus; il comprit qu'il fallait les avoir sans cesse devant les yeux. Que ferai-je toute ma vie? se disait-il; je vendrai aux fidèles une place dans le ciel. Comment cette place leur sera-t-elle rendue visible? par la différence de mon extérieur et de celui d'un laïc.

Après plusieurs mois d'application de tous les instants, Julien avait encore l'air de penser. Sa façon de remuer les yeux et de porter la bouche n'annonçait pas la foi implicite et prête à tout croire et à tout soutenir, même par le martyre. C'était avec colère que Julien se voyait primé dans ce genre par les paysans les plus grossiers. Il y avait de bonnes raisons pour qu'ils n'eussent pas l'air penseur.

Que de peine ne se donnait-il pas pour arriver à cette physionomie de foi fervente et aveugle, prête à tout croire et à tout souffrir, que l'on trouve si fréquemment dans les couvents d'Italie, et dont à nous autres laïcs, le Guerchin a laissé de si parfaits modèles dans ses tableaux d'église*. [* Voir, au musée du Louvre, François duc d'Aquitaine déposant la cuirasse et prenant l'habit de moine, n° 1130.]

Les jours de grande fête, on donnait aux séminaristes des saucisses avec de la choucroute. Les voisins de table de Julien observèrent qu'il était insensible à ce bonheur; ce fut là un de ses premiers crimes. Ses camarades y virent un trait odieux de la plus sotte hypocrisie; rien ne lui fit plus d'ennemis. Voyez ce bourgeois, voyez ce dédaigneux, disaient-ils, qui fait semblant de mépriser la meilleure pitance, des saucisses avec de la choucroute! fi, le vilain! l'orgueilleux! le damné!

Hélas! l'ignorance de ces jeunes paysans, mes camarades, est pour eux un avantage immense, s'écriait Julien dans ses moments de découragement. A leur arrivée au séminaire, le professeur n'a point à les délivrer de ce nombre effroyable d'idées mondaines que j'y apporte, et qu'ils lisent sur ma figure, quoi que je fasse.

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5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 15:28

Lorsque Maheu rentra, après avoir laissé Etienne chez Rasseneur, il trouva Catherine, Zacharie et Jeanlin attablés, qui achevaient leur soupe. Au retour de la fosse, on avait si faim, qu'on mangeait dans ses vêtements humides, avant même de se débarbouiller; et personne ne s'entendait, la table restait mise du matin au soir, toujours il y en avait un là, avalant sa portion, au hasard des exigences du travail.

Dès la porte, Maheu aperçut les provisions. Il ne dit rien, mais son visage inquiet s'éclaira. Toute la matinée, le vide du buffet, la maison sans café et sans beurre, l'avait tracassé, lui était revenue en élancements douloureux, pendant qu'il tapait à la veine, suffoqué au fond de la taille. Comment la femme aurait-elle fait? et qu'allait-on devenir, si elle était rentrée les mains vides? Puis, voilà qu'il y avait de tout. Elle lui conterait ça plus tard. Il riait d'aise.

Déjà Catherine et Jeanlin s'étaient levés, prenant leur café debout; tandis que Zacharie, mal rempli par sa soupe, se coupait une large tartine de pain, qu'il couvrait de beurre. Il voyait bien le fromage de cochon sur une assiette; mais il n'y touchait pas, la viande était pour le père, quand il n'y en avait que pour un. Tous venaient de faire descendre leur soupe d'une grande lampée d'eau fraîche, la bonne boisson claire des fins de quinzaine.

- Je n'ai pas de bière, dit la Maheude, lorsque le père se fut attablé à son tour. J'ai voulu garder un peu d'argent... Mais, si tu en désires, la petite peut courir en prendre une pinte.
Il la regardait, épanoui. Comment? elle avait aussi de l'argent!

- Non, non, dit-il. J'ai bu une chope, ça va bien.

Et Maheu se mit à engloutir, par lentes cuillerées, la pâtée de pain, de pommes de terre, de poireaux et d'oseille, enfaîtée dans la jatte qui lui servait d'assiette. La Maheude, sans lâcher Estelle, aidait Alzire à ce qu'il ne manquât de rien, poussait près de lui le beurre et la charcuterie, remettait au feu son café pour qu'il fût bien chaud.

[...]

Et, après avoir bu un plein verre d'eau, il attaqua le fromage de cochon. Il en coupait des morceaux carrés, qu'il piquait de la pointe de son couteau et qu'il mangeait sur son pain, sans fourchette. On ne parlait pas, quand le père mangeait. Lui-même avait la faim silencieuse, il ne reconnaissait point la charcuterie habituelle de Maigrat, ça devait venir d'ailleurs; pourtant, il n'adressait aucune question à sa femme. Il demanda seulement si le vieux dormait toujours, là-haut. Non, le grand-père était déjà sorti, pour son tour de promenade accoutumé. Et le silence recommença.

Mais l'odeur de la viande avait fait lever les têtes de Lénore et d'Henri, qui s'amusaient par terre à dessiner des ruisseaux avec l'eau répandue. Tous deux vinrent se planter près du père, le petit en avant. Leurs yeux suivaient chaque morceau, le regardaient pleins d'espoir partir de l'assiette, et le voyaient d'un air consterné s'engouffrer dans la bouche. A la longue, le père remarqua le désir gourmand qui les pâlissait et leur mouillait les lèvres.

- Est-ce que les enfants en ont eu? demanda-t-il.

Et, comme sa femme hésitait:

- Tu sais, je n'aime pas les injustices. Ca m'ôte l'appétit, quand ils sont là, autour de moi, à mendier un morceau.

- Mais oui, ils en ont eu! s'écria-t-elle, en colère. Ah bien! si tu les écoutes, tu peux leur donner ta part et celle des autres, ils s'empliront jusqu'à crever... N'est-ce pas, Alzire, que nous avons tous mangé du fromage?

- Bien sûr, maman, répondit la petite bossue, qui, dans ces circonstances-là, mentait avec un aplomb de grande personne.

Lénore et Henri restaient immobiles de saisissement, révoltés d'une pareille menterie, eux qu'on fouettait, s'ils ne disaient pas la vérité. Leurs petits coeurs se gonflaient, et ils avaient une grosse envie de protester, de dire qu'ils n'étaient pas là, eux, lorsque les autres en avaient mangé.

- Allez-vous-en donc! répétait la mère, en les chassant à l'autre bout de la salle. Vous devriez rougir d'être toujours dans l'assiette de votre père. Et, s'il était le seul à en avoir, est-ce qu'il ne travaille pas, lui? tandis que vous autres, tas de vauriens, vous ne savez encore que dépenser. Ah! oui, et plus que vous n'êtes gros!

Maheu les rappela. Il assit Lénore sur sa cuisse gauche, Henri sur sa cuisse droite; puis, il acheva le fromage de cochon, en faisant la dînette avec eux. Chacun sa part, il leur coupait des petits morceaux. Les enfants, ravis, dévoraient.

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5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 15:25

Quand la Maheude rentra, elle fit un détour pour aller acheter des pommes de terre, chez la femme d'un surveillant, qui en avait encore de sa récolte. Derrière un rideau de peupliers malingres, les seuls arbres de ces terrains plats, se trouvait un groupe de constructions isolées, des maisons quatre par quatre, entourées de leurs jardins. Comme la Compagnie réservait aux porions ce nouvel essai, les ouvriers avaient surnommé ce coin du hameau le coron des Bas-de-Soie; de même qu'ils appelaient leur propre coron Paie-tes-Dettes, par une ironie bonne enfant de leur misère.

- Ouf! nous y voilà, dit la Maheude chargée de paquets, en poussant chez eux Lénore et Henri, boueux, les jambes mortes.

Devant le feu, Estelle hurlait, bercée dans les bras d'Alzire. Celle-ci, n'ayant plus de sucre, ne sachant comment la faire taire, s'était décidée à feindre de lui donner le sein. Ce simulacre, souvent, réussissait. Mais, cette fois, elle avait beau écarter sa robe, lui coller la bouche sur sa poitrine maigre d'infirme de huit ans, l'enfant s'enrageait de mordre la peau et de n'en rien tirer.

- Passe-la-moi, cria la mère, dès qu'elle se trouva débarrassée. Elle ne nous laissera pas dire un mot.

Lorsqu'elle eut sorti de son corsage un sein lourd comme une outre, et que la braillarde se fut pendue au goulot, brusquement muette, on put enfin causer. Du reste, tout allait bien, la petite ménagère avait entretenu le feu, balayé, rangé la salle. Et, dans le silence, on entendait en haut ronfler le grand-père, du même ronflement rythmé, qui ne s'était pas arrêté un instant.

- En voilà des choses! murmura Alzire, en souriant aux provisions. Si tu veux, maman, je ferai la soupe.

La table était encombrée: un paquet de vêtements, deux pains, des pommes de terre, du beurre, du café, de la chicorée et une demi-livre de fromage de cochon.

- Oh! la soupe! dit la Maheude d'un air de fatigue, il faudrait aller cueillir de l'oseille et arracher des poireaux... Non, j'en ferai ensuite pour les hommes... Mets bouillir des pommes de terre, nous les mangerons avec un peu de beurre... Et du café, hein? n'oublie pas le café!

Mais, tout d'un coup, l'idée de la brioche lui revint. Elle regarda les mains vides de Lénore et d'Henri, qui se battaient par terre, déjà reposés et gaillards. Est-ce que ces gourmands n'avaient pas, en chemin, mangé sournoisement la brioche! Elle les gifla, pendant qu'Alzire, qui mettait la marmite au feu, tâchait de l'apaiser.

- Laisse-les, maman. Si c'est pour moi, tu sais que ça m'est égal, la brioche. Ils avaient faim, d'être allés si loin à pied.


Midi sonnèrent, on entendit les galoches des gamins qui sortaient de l'école. Les pommes de terre étaient cuites, le café, épaissi d'une bonne moitié de chicorée, passait dans le filtre, avec un bruit chantant de grosses gouttes. Un coin de la table fut débarrassé; mais la mère seule y mangea, les trois enfants se contentèrent de leurs genoux; et, tout le temps, le petit garçon, qui était d'une voracité muette, se tourna sans rien dire vers le fromage de cochon, dont le papier gras le surexcitait.

La Maheude buvait son café à petits coups, les deux mains autour du verre pour les réchauffer, lorsque le père Bonnemort descendit. D'habitude, il se levait plus tard, son déjeuner l'attendait sur le feu. Mais, ce jour-là, il se mit à grogner, parce qu'il n'y avait point de soupe. Puis, quand sa bru lui eut dit qu'on ne faisait pas toujours comme on voulait, il mangea ses pommes de terre en silence. De temps à autre, il se levait, allait cracher dans les cendres, par propreté; et, tassé ensuite sur sa chaise, il roulait la nourriture au fond de sa bouche, la tête basse, les yeux éteints.

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5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 15:19

Zola, Germinal

Ce matin-là, les Grégoire s'étaient levés à huit heures. D'habitude, ils ne bougeaient guère qu'une heure plus tard, dormant beaucoup, avec passion; mais la tempête de la nuit les avait énervés. Et, pendant que son mari était allé voir tout de suite si le vent n'avait pas fait de dégâts, Mme Grégoire venait de descendre à la cuisine, en pantoufles et en peignoir de flanelle. Courte, grasse, âgée déjà de cinquante-huit ans, elle gardait une grosse figure poupine et étonnée, sous la blancheur éclatante de ses cheveux.
- Mélanie, dit-elle à la cuisinière, si vous faisiez la brioche ce matin, puisque la pâte est prête. Mademoiselle ne se lèvera pas avant une demi-heure, et elle en mangerait avec son chocolat... Hein! ce serait une surprise.

La cuisinière, vieille femme maigre qui les servait depuis trente ans, se mit à rire.

- Ca, c'est vrai, la surprise serait fameuse... Mon fourneau est allumé, le four doit être chaud; et puis, Honorine va m'aider un peu.

Honorine, une fille d'une vingtaine d'années, recueillie enfant et élevée à la maison, servait maintenant de femme de chambre. Pour tout personnel, outre ces deux femmes, il n'y avait que le cocher, Francis, chargé des gros ouvrages. Un jardinier et une jardinière s'occupaient des légumes, des fruits, des fleurs et de la basse-cour. Et, comme le service était patriarcal, d'une douceur familière, ce petit monde vivait en bonne amitié.

Mme Grégoire, qui avait médité dans son lit la surprise de la brioche, resta pour voir mettre la pâte au four. La cuisine était immense, et on la devinait la pièce importante, à sa propreté extrême, à l'arsenal des casseroles, des ustensiles, des pots qui l'emplissaient. Cela sentait bon la bonne nourriture. Des provisions débordaient des râteliers et des armoires.

- Et qu'elle soit bien dorée, n'est-ce pas? recommanda Mme Grégoire en passant dans la salle à manger.

Malgré le calorifère qui chauffait toute la maison, un feu de houille égayait cette salle. Du reste, il n'y avait aucun luxe: la grande table, les chaises, un buffet d'acajou; et, seuls, deux fauteuils profonds trahissaient l'amour du bien-être, les longues digestions heureuses. On n'allait jamais au salon, on demeurait là, en famille.

[...]

Ils s'attablaient enfin, le chocolat fumait dans les bols, on ne parla longtemps que de la brioche. Mélanie et Honorine restaient, donnaient les détails sur la cuisson, les regardaient se bourrer, les lèvres grasses, en disant que c'était un plaisir de faire un gâteau, quand on voyait les maîtres le manger si volontiers.

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5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 15:06

Diderot, Jacques le Fataliste et son maître

Au milieu de ces lamentations, on sonnait d'un côté, et l'on criait: "Notre hôtesse! du vin..." Elle répondait: "On y va." On sonnait d'un autre côté, et l'on criait: "Notre hôtesse! du linge!" Elle répondait: "On y va. - Les côtelettes et le canard! - On y va. - Un pot à boire, un pot de chambre! - On y va, on y va."
Et d'un autre coin du logis un homme forcené criait: "Maudit bavard! enragé bavard! de quoi te mêles-tu? As-tu résolu de me faire attendre jusqu'à demain? Jacques! Jacques!"
L'hôtesse, un peu remise de sa douleur et de sa fureur, dit à Jacques: "Monsieur, laissez-moi, vous êtes trop bon.
- Jacques! Jacques!
- Courez vite. Ah! si vous saviez tous les malheurs de cette pauvre créature!...
- Jacques! Jacques!
- Allez donc, c'est, je crois, votre maître qui vous appelle.

- Jacques! Jacques!"
C'était en effet le maître de Jacques qui s'était déshabillé seul, qui se mourait de faim et qui s'impatientait de n'être pas servi. Jacques monta, et un moment après Jacques, l'hôtesse, qui avait vraiment l'air abattu: "Monsieur, dit-elle au maître de Jacques, mille pardons; c'est qu'il y a des choses dans la vie qu'on ne saurait digérer. Que voulez-vous? J'ai des poulets, des pigeons, un râble de lièvre excellent, des lapins: c'est le canton des bons lapins. Aimeriez-vous mieux un oiseau de rivière?" Jacques ordonna le souper de son maître comme pour lui, selon son usage. On servit, et tout en dévorant, le maître disait à Jacques: "Eh! que diable faisais-tu là-bas?

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