750 grammes
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Plume-pudding

Gastronomie

5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 15:04

Flaubert, Madame Bovary

C'était sous le hangar de la charretterie que la table était dressée. Il y avait dessus quatre aloyaux, six fricassées de poulets, du veau à la casserole, trois gigots, et, au milieu, un joli cochon de lait rôti, flanqué de quatre endeuilles à l'oseille. Aux angles, se dressait l'eau-de-vie dans des carafes. Le cidre doux en bouteilles poussait sa mousse épaisse autour des bouchons, et tous les verres, d'avance, avaient été remplis de vin jusqu'au bord. De grands plats de crème jaune, qui flottaient d'eux-mêmes au moindre choc de la table, présentaient, dessinés sur leur surface unie, les chiffres des nouveaux époux en arabesques de nonpareille. On avait été chercher un pâtissier à Yvetot, pour les tourtes et les nougats. Comme il débutait dans le pays, il avait soigné les choses ; et il apporta, lui-même, au dessert, une pièce montée qui fit pousser des cris. A la base, d'abord, c'était un carré de carton bleu figurant un temple avec portiques, colonnades et statuettes de stuc tout autour, dans des niches constellées d'étoiles en papier doré ; puis se tenait au second étage un donjon en gâteau de Savoie, entouré de menues fortifications en angélique, amandes, raisins secs, quartiers d'oranges ; et enfin, sur la plate-forme supérieure, qui était une prairie verte où il y avait des rochers avec des lacs de confitures et des bateaux en écales de noisettes, on voyait un petit Amour, se balançant à une escarpolette de chocolat, dont les deux poteaux étaient terminés par deux boutons de rose naturels, en guise de boules, au sommet.

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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 22:08
Gargantua, 1534, édition princeps

L'estude & diète de Gargantua,

scelon la discipline de ses precepteurs Sorbonagres.


Chap. xx.

Après avoir bien à poinct desieuné, alloit à l'ecclise, & luy portoit on dedans un grand penier un gros breviaire empantouflé, pesant tant en gresse que en fremoirs & parchemin poy plus poy moins unze quintaulx. Là oyoit vingt & six ou trente messes, & ce pendent venoit son diseur d'heures en place, empaletocqué comme une duppe, & tresbien antidoté son alaine à force syropt vignolat. Avecques icelluy marmonnoit toutes ces kyrielles: & tant curieusement les espluschoit, qu'il n'en tomboit un seul grain en terre. Au partir de l'ecclise, on luy amenoit sur une traine à beufz un faratz de patenostres de sainct Claude, aussi grosses chacune, qu'est le moulle d'un bonnet: & se pourmenant par les cloistres, galeries, ou iardin en disoit plus que seize hermites. Puis estudioyt quelque meschante demye heure, les yeulx assis dessus son livre, mais (comme dict le Comicque) son ame estoit en la cuysine. Pissant doncq plein official, se asseoyt à table. Et par ce qu'il estoit naturellement phlegmaticque, commençoit son repas, par quelques douzaines de iambons, de langues de beuf fumées, de boutargues, d'andouilles, & telz aultres avant coureurs de vin. Ce pendent quatre de ses gens, luy gettoient en la bouche l'un après l'aultre continuement de la moustarde à pleines palerées puis beuvoit un horrificque traict de vin blanc, pour luy soulaiger les roignons. Après mangoit selon la saison viandes à son appetit, & lors cessoit de manger quand le ventre luy tiroit. A boire n'avoit poinct de fin, ny de canon. Car il disoit que les metes et bournes de boyre estoient quand la personne beuvant, le liège de ses pantoufles enfloit en haut d'un demy pied. Puis tout lourdement grignotant d'un transon de graces, se lavoit les mains de vin frais, s'escuroit les dens avec un pied de porc, & devisoit ioyeusement avec ses gens.

    Puis le verd estendu l'on desployait force chartes, force dez, & renfort de tabliers. Là iouyoit au fleux, au cent, à la prime, à la vole, à le pille, à la triumphe: à la picardre, à l'espinay, à trente & un, à la condemnade, à la carte virade, au moucontent, au cocu, à qui a si parle, à pille: nade: iocque: fore, à mariage, au gay, à l'opinion, à qui faict l'un faict l'autre, à la sequence, aux luettes, au tarau, à qui gaigne perd, au belin, à la ronfle, au glic, aux honneurs, à l'amourre, aux eschetz, au renard, aux marrelles, aux vasches, à la blanche, à la chance, à troys dez, aux talles, à la nicnocque. A lourche, à la renette, au barignin, au trictrac, à toutes tables, aux tables rabatues, au reniguebleu, au force, aux dames: à la babou, à primus secundus, au pied du cousteau, aux clefz, au franc du carreau, à par ou sou, à croix ou pille, aux pigres, à la bille, à la vergette, au palet, au iensuis, à fousquet, aux quilles, au rampeau, à la boulle plate, au pallet, à la courte boulle, à la griesche, à la recoquillette, au cassepot, au montalet, à la pyrouete, aux ionchées, au court baston, au pyrevollet, à cline musseté, au picquet, à la seguette, au chastelet, à la rengée, à la souffete, au ronflart, à la trompe, au moyne, au tenebry, à l'esbahy, à la foulle, à la navette, à fessart, au ballay, à sainct Cosme ie viens adorer, au chesne forchu, au chevau fondu, à la queue au loup, à pet en gueulle, à guillemain baille my ma lance, à la brandelle, au trezeau, à la mousche, à la migne migne beuf, au propous, à neuf mains, au chapifou, aux ponts cheuz, à colin bridé, à la grotte, au cocquantin, à collin maillard, au crapault, à la crosse, au piston, au bille boucquet, aux roynes, aux mestiers, à teste à teste bechevel, à laver la coiffe ma dame, au belusteau, à semer l'avoyne, à briffault, au molinet, à defendo, à la virevouste, à la vaculle, au laboureur, à la cheveche, aux escoublettes enraigées, à la beste morte, à monte monte l'eschelette, au pourceau mory, à cul sallé, au pigeonnet, au tiers, à la bourrée, au sault du buysson, à croyzer, à la cutte cache, à la maille bourse en cul, au nic de la bondrée, au passavant, à la figue, aux petarrades, à pillemoustard, aux allouettes, aux chinquenaudes.

    Après avoir bien ioué & beluté temps, il convenoit boire quelque peu, c'estoient unze peguadz pour homme. Et soubdain après bancqueter c'estoit sus un beau banc, ou en beau plein lict s'estendre & dormir deux ou troys heures sans mal penser, ny mal dire.
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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 21:32
Pantagruel, 1532, édition princeps

Comment Panurge, Carpalim, Eusthenes, et Epistemon,compaignons de Pantagruel, desconfirent six cens soixante chevaliers bien subtilement.

Chapitre. xvi.

Ainsi qu'ilz bancquetoient Carpalim dist. Et ventre sainct Quenet ne mangerons nous iamais de venaison? Ceste chair sallée me altere tout. Ie m'en voys vous apporter icy une cuysse de ces chevaulx que avons faict brusler, elle sera assez bien roustie. Tout ainsi qu'il se levoit pour ce faire apperceut à l'orée du boys ung beau grand gras chevreul, qui estoit yssu du fort voyant le feu de Panurge, à mon advis. Et incontinent se mist apres à courir de telle roiddeur, qu'il sembloit que feust ung carreau d'arbaleste, & l'atrapa en moins d'ung riens, [et en courant print de ses mains en l'air quatre grandes otardes, six bitars, vingt & six perdrix grises, & trente & deux pigeons ramiers,] et en courant tua des pieds dix ou douze que chevraulx que lapins qui ià estoient hors de page. Doncq il frappa le chevreul de son malcus à travers la teste et le tua, & en l'apportant recueillit ses levraulx.
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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 18:10
ingrédients

3 oeufs très frais
100 g de chorizo piquant
ciboulette
sel
poivre du moulin

matériel

poêle
cuiller en bois

Pelez le chorizo et coupez-le en tronçons. Faites-le revenir dans une poêle. Lorsqu'il a rendu suffisamment de matière grasse, cassez les oeufs dans la poêle et mélangez-les avec la cuiller en bois. Salez (très peu, car le chorizo l'est déjà) et poivrez. Continuez à mélanger jusqu'à ce que les oeufs aient la bonne consistance (cuits, mais encore humides).
Servez chaud en saupoudrant sur le dessus de la ciboulette ciselée.

Remarque

Des oeufs brouillés améliorés et très gourmands. La ciboulette apporte une note végétale bienvenue.
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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 16:27
ingrédients

une douzaine de tomates rondes assez mûres, de taille moyenne
ail séché.
herbes de Provence
sel
poivre du moulin

matériel

four et lèchefrite
papier sulfurisé

Préchauffez le four à 180°C.
Lavez les tomates et coupez-les en deux dans la largeur. Disposez-les sur la lèchefrite  où vous  aurez déroulé une feuille de papier sulfurisé. Salez et poivrez, puis ajoutez les herbes et  l'ail.
Enfournez pour environ 3/4 d'heure. Surveillez la cuisson : les tomates doivent être presque confites, sans noircir ni éclater.

Remarques

Servies avec du riz, ces savoureuses tomates, faciles à réaliser, fourniront un excellent accompagnement pour des grillades.
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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 14:54
Mais ainsi sont les Anglais : ils croient faire plus grand en faisant plus gros !
A six heures et quelques minutes, nous abordâmes presque en face du restaurant, hôtel Brunswick.
Permettez-moi de vous donner la carte de notre dîner.
Cette carte est une curiosité dans son genre. M. Young, notre amphitryon, en nabab qu'il est, avait royalement fait les choses.
Ceci, chers lecteurs, s'adresse aux gourmands, si toutefois j'ai des gourmands, ce que j'espère bien, parmi les lecteurs.
Si j'ai des gourmands, qu'ils osent avouer leur gourmandise, et, si l'occasion s'en présente, nous causerons cuisine.
Ils verrons qu'en théorie, du rnoins, je suis digne de faire leur partie.

                    Carte du dîner donné par M. Young.

                              Potages.

Tortue à l'anglaise.
Printanier.

                              Premier service

Truite à la tartare.
Water-zootches de perches, soles, saumons, truites et anguilles.
Tranches de saumon de Gloucester.
Turbot sauce au homard.
Rougets en papillotes.
Boudins de merlan à la reine.
Filets de sole à la Orly.
Saint-Pierre à la crème.
Matelote normande.
Friture de flottons et d'anguilles.
Rissoles de homard.
Quenelles de saumon.
Crevettes en buisson.
Côtelettes de saumon à l'italienne.
White-bais au naturel.
White-bais en Méphistophélès.

                              Relevés.

Poularde à la Montmorency.
Noix de veau à la jardinière.
Pâté froid à la royale.
Poularde à l'ivoire, sauce suprême.
Bastion de volaille.
Jambon de Bayonne.
Lard garni de fèves.

                              Entrées.

Côtelettes à la Maintenon.
Vol-au-vent à la financière.
Escalope de caille aux truffes.
Riz de veau en macédoine.
Kari à l'indienne.
Filets de pigeon à l'italienne.
Fricassée de volaille aux truffes.
Chartreuse à la Toulouse.

                              Second service

                              Rôts.

Chapon et petits poulets au cresson.
Dindonneau.
Venaison. Levreau.
Cailles bardées.
Canetons à la ferme.

                              Relevés.

Charlotte Plombières.
Boudin à la Jenny Lind.

                              Entremets.

Boudin Saint-Clair.
Haricots verts.
Croûte de champignons.
Crème de Montmorency.
Fromages de Neuchâtel.
Tourte de cerises à l'anglaise.
Fromages bavarois.
Gelée au marasquin garnie de fraises.
Petits pois.
Bayonnaise de homard.
Meringues à la glace.
Gâteau de millefeuille.
Bordure génevoise garnie de reines-claude
Gelée, macédoine de fruits.
Riz à la Brunswick.
Radis et salade.

                             Dessert.

Fraises.
Raisins.
Ananas.
Mandarines et tangerines.
Conserves de pèches, d'abricots, de mirabelles, etc., etc

                              Vins.

Hock, sherry, champagne, madère.
Porto, claret, château-margaux.
Château- dickins.
Constance.
Tockay.

Vous comprendrez sans peine, chers lecteurs, qu'un pareil dîner nous conduisit à dix heures du soir.
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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 14:01
La salle du festin était un long berceau de branches d'arbres, formant une tente assez basse, attendu qu'il n'y avait pas de table, mais un grand tapis étendu. Sur ce tapis était servi un dîner splendide et tout fait homérique, où figuraient deux moutons entiers ; la ligne du milieu, qui était réservée aux viandes était, en outre, flanquée de deux autres lignes chargées de pâtisseries. Les femmes s'assirent les premières, les jambes croisées sous elles, à la manière turque, et tenant leurs fils d'or à la main ; les jeunes gens, qui avaient attaché le leur à un bouton de leur veste, le détachèrent à leur tour, pour prouver le droit qu'ils avaient de prendre leurs places en face de leurs partenaires, et s'assirent dans la même posture, qui n'était pas sans inconvénient pour moi ; mais tout fut oublié, quand je me trouvai en face de Fatinitza.

Le dîner se passa bruyamment, au milieu d'une musique assourdissante et de chants profanes et sacrés, entremêlés de la manière la plus naïve et la plus grotesque. Il dura plusieurs heures, pendant lesquelles je ne pus guère échanger que quelques paroles avec Fatinitza, mais où je pus m'enivrer du plaisir de la voir.

Après le dessert, où les vins de Chypre et de Samos avaient porté la gaieté à leur comble, on se leva et les danses commencèrent.
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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 13:52
En rentrant dans la première pièce, je trouvai Cama désespéré; il avait déjà fait sa visite, et n'avait trouvé ni casserole, ni gril, ni broche. Je l'invitai à se procurer d'abord de quoi griller, bouillir ou rôtir; nous verrions ensuite comment remplacer les ustensiles absents.
Après avoir attaché ses mules au râtelier, Salvadore apparut à son tour, et entra dans la chambre voisine; mais un instant après il en sortit en disant que, le maître de la maison se trouvant à Secocca, et sa femme étant à moitié idiote, nous n'avions qu'à agir comme nous ferions dans une maison abandonnée. Les provisions se bornaient, nous dit-il, à une cruche d'huile rance et à quelques châtaignes: pour du pain, il n'en avait pas.
Si ce langage n'était pas rassurant, il avait au moins le mérite d'être parfaitement clair. Chacun se mit donc en quête de son côté, et s'occupa de rassembler ce qu'il put: Jadin, après une demi-heure de course dans les rochers, rapporta une espèce de colombe; Salvadore avait tordu le cou à une vieille poule; j'avais, dans un hangar bâti en retour de la maison, trouvé trois oeufs; enfin, Cama avait dépouillé le jardin, et réuni deux grenades et une douzaines de figues d'Inde. Tout ceci, joint au lapin heureusement mis à mort pendant que Jadin faisait le portrait de Salvadore, présentait tant bien que mal l'apparence d'un dîner. Il ne restait plus qu'à l'apprêter.
Ne trouvant pas de casserole, et forcés d'employer de l'huile rance au lieu de beurre, nous arrêtâmes que notre menu se composerait d'un potage à la poule, d'un rôti de gibier, de trois oeufs à la coque en entremets, et de nos grenades flanquées de nos figues d'Inde en dessert; les châtaignes, cuites sous la cendre, devaient remplacer le pain.
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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 13:40
[...]
Bientôt l'heure du dîner arriva. On passa dans la salle à manger, grande pièce noire qui était située en face de la cuisine.
Les clercs, qui, à ce qu'il paraît, avaient senti dans la maison des parfums inaccoutumés, étaient d'une exactitude militaire, et tenaient en main leurs tabourets, tout prêts qu'ils étaient à s'asseoir. On les voyait d'avance remuer les mâchoires avec des dispositions effrayantes.
« Tudieu ! pensa Porthos en jetant un regard sur les trois affamés, car le saute-ruisseau n'était pas, comme on le pense bien, admis aux honneurs de la table magistrale ; tudieu ! à la place de mon cousin, je ne garderais pas de pareils gourmands. On dirait des naufragés qui n'ont pas mangé depuis six semaines. »
Maître Coquenard entra, poussé sur son fauteuil à roulettes par Mme Coquenard, à qui Porthos, à son tour, vint en aide pour rouler son mari jusqu'à la table. A peine entré, il remua le nez et les mâchoires à l'exemple de ses clercs.
- Oh ! oh ! dit-il, voici un potage qui est engageant.
« Que diable sentent-ils donc d'extraordinaire dans ce potage ? » dit Porthos à l'aspect d'un bouillon pâle, abondant, mais parfaitement aveugle, et sur lequel quelques croûtes nageaient rares comme les îles d'un archipel.
Mme Coquenard sourit, et, sur un signe d'elle, tout le monde s'assit avec empressement.
Maître Coquenard fut le premier servi, puis Porthos ; ensuite Mme Coquenard emplit son assiette, et distribua les croûtes sans bouillon aux clercs impatients.
En ce moment la porte de la salle à manger s'ouvrit d'elle-même en criant, et Porthos, à travers les battants entrebâillés, aperçut le petit clerc, qui, ne pouvant prendre part au festin, mangeait son pain à la double odeur de la cuisine et de la salle à manger.
Après le potage la servante apporta une poule bouillie, magnificence qui fit dilater les paupières des convives, de telle façon qu'elles semblaient prêtes à se fendre.
- On voit que vous aimez votre famille, madame Coquenard, dit le procureur avec un sourire presque tragique ; voilà certes une galanterie que vous faites à votre cousin.
La pauvre poule était maigre et revêtue d'une de ces grosses peaux hérissées que les os ne percent jamais malgré leurs efforts ; il fallait qu'on l'eût cherchée bien longtemps avant de la trouver sur le perchoir où elle s'était retirée pour mourir de vieillesse.
« Diable ! pensa Porthos, voilà qui est fort triste ; je respecte la vieillesse, mais j'en fais peu de cas bouillie ou rôtie. »
Et il regarda à la ronde pour voir si son opinion était partagée ; mais tout au contraire de lui, il ne vit que des yeux flamboyants, qui dévoraient d'avance cette sublime poule, objet de ses mépris.
Mme Coquenard tira le plat à elle, détacha adroitement les deux grandes pattes noires, qu'elle plaça sur l'assiette de son mari ; trancha le cou, qu'elle mit avec la tête à part pour elle-même ; leva l'aile pour Porthos, et remit à la servante, qui venait de l'apporter, l'animal, qui s'en retourna presque intact, et qui avait disparu avant que le mousquetaire eût eu le temps d'examiner les variations que le désappointement amène sur les visages, selon les caractères et les tempéraments de ceux qui l'éprouvent.
Au lieu de poulet, un plat de fèves fit son entrée, plat énorme, dans lequel quelques os de mouton, qu'on eût pu, au premier abord, croire accompagnés de viande, faisaient semblant de se montrer.
Mais les clercs ne furent pas dupes de cette supercherie, et les mines lugubres devinrent des visages résignés.
Mme Coquenard distribua ce mets aux jeunes gens avec la modération d'une bonne ménagère.
Le tour du vin était venu. Maître Coquenard versa d'une bouteille de grès fort exigu le tiers d'un verre à chacun des jeunes gens, s'en versa à lui- même dans des proportions à peu près égales, et la bouteille passa aussitôt du côté de Porthos et de Mme Coquenard.
Les jeunes gens remplissaient d'eau ce tiers de vin, puis, lorsqu'ils avaient bu la moitié du verre, ils le remplissaient encore, et ils faisaient toujours ainsi ; ce qui les amenait à la fin du repas à avaler une boisson qui de la couleur du rubis était passée à celle de la topaze brûlée.
Porthos mangea timidement son aile de poule, et frémit lorsqu'il sentit sous la table le genou de la procureuse qui venait trouver le sien. Il but aussi un demi-verre de ce vin fort ménagé, et qu'il reconnut pour cet horrible cru de Montreuil, la terreur des palais exercés.
Maître Coquenard le regarda engloutir ce vin pur et soupira.
- Mangerez-vous bien de ces fèves, mon cousin Porthos ? dit Mme Coquenard de ce ton qui veut dire : croyez-moi, n'en mangez pas.
- Du diable si j'en goûte ! murmura tout bas Porthos.
Puis tout haut :
- Merci, ma cousine, dit-il, je n'ai plus faim.
Il se fit un silence : Porthos ne savait quelle contenance tenir. Le procureur répéta plusieurs fois :
- Ah ! madame Coquenard ! je vous en fais mon compliment, votre dîner était un véritable festin ; Dieu ! ai-je mangé !
Maître Coquenard avait mangé son potage, les pattes noires de la poule et le seul os de mouton où il y eût un peu de viande.
Porthos crut qu'on le mystifiait, et commença à relever sa moustache et à froncer le sourcil ; mais le genou de Mme Coquenard vint tout doucement lui conseiller la patience.
Ce silence et cette interruption de service, qui étaient restés inintelligibles pour Porthos, avaient au contraire une signification terrible pour les clercs : sur un regard du procureur, accompagné d'un sourire de Mme Coquenard, ils se levèrent lentement de table, plièrent leurs serviettes plus lentement encore, puis ils saluèrent et partirent.
- Allez, jeunes gens, allez faire la digestion en travaillant, dit gravement le procureur.
Les clercs partis, Mme Coquenard se leva et tira d'un buffet un morceau de fromage, des confitures de coings et un gâteau qu'elle avait fait elle-même avec des amandes et du miel.
Maître Coquenard fronça le sourcil, parce qu'il voyait trop de mets ; Porthos se pinça les lèvres, parce qu'il voyait qu'il n'y avait pas de quoi dîner.
Il regarda si le plat de fèves était encore là, le plat de fèves avait disparu.
- Festin décidément, s'écria maître Coquenard en s'agitant sur sa chaise, véritable festin, epulae epularum ; Lucullus dîne chez Lucullus.
Porthos regarda la bouteille qui était près de lui, et il espéra qu'avec du vin, du pain et du fromage il dînerait ; mais le vin manquait, la bouteille était vide ; M. et Mme Coquenard n'eurent point l'air de s'en apercevoir.
« C'est bien, se dit Porthos à lui-même, me voilà prévenu. »
Il passa sa langue sur une petite cuillerée de confitures, et s'englua les dents dans la pâte collante de Mme Coquenard.
« Maintenant, dit-il, le sacrifice est consommé. Ah ! si je n'avais pas l'espoir de regarder avec Mme Coquenard dans l'armoire de son mari. »
[...]
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30 décembre 2006 6 30 /12 /décembre /2006 20:52



                               version orange


                               version citron


VERSION ORANGE

ingrédients

4 oranges dont 2 non traitées
100 g de beurre mou, à température ambiante + 10 g pour le moule
3 oeufs
100 g de sucre en poudre
30 g de sucre glace environ
150 g de farine
1 sachet de levure chimique
1 cuiller à soupe de rhum brun
quelques cuillers à soupe de confiture d'abricot
1 pincée de sel

pour la décoration facultative

50 g de sucre en poudre
50 g de sucre glace
zestes réservés
1 carré e chocolat noir
1 sarment du Médoc à l'orange ou à la mandarine (sorte de bâtonnets en chocolat)

matériel


moule à manqué assez petit (22 cm de diamètre environ)
batteur électrique
presse-agrume (conseillé mais pas indispensable)
couteau zesteur (conseillé mais pas indispensable)

Dans un saladier assez grand, faites une pommade avec le beurre sorti à l'avance et le sucre à l'aide d'une cuiller à soupe. Cassez les oeufs un à un en séparant les blancs des jaunes : ajoutez les jaunes un à un à la pommade et placez les blancs dans un autre saladier. Mélangez bien la préparation (plutôt à la cuiller, car la pâte collerait au fouet) jusqu'à obtenir une crème homogène et onctueuse.
Râpez le zeste des oranges non traitées et incorporez-en la moitié à la préparation avec le rhum. Réservez le reste pour la décoration.
Ajoutez progressivement la farine et la levure, en mélangeant bien Pressez le jus des deux oranges dont vous avez prélevé le zeste et versez-le en plusieurs fois dans la préparation.
Préchauffez le four th 5 (170° C).
Battez les blancs en neige assez ferme avec le sel, puis incorporez-les délicatement à la préparation. Beurrez le moule et versez-y le tout. Enfournez pour environ 3/4 d'heure. Le gâteau cuit doit être bien doré et bombé sur le dessus.
Démoulez le gâteau encore chaud et versez dessus le jus des 2 autres oranges.

Décoration :

Etalez la confiture sur le dessus du gâteau. Dans une petite casserole, faites blanchir les zestes mis à part, égouttez-les et jetez l'eau. Replacez les zestes sur la casserole, saupoudrez-les du sucre en poudre, ajoutez de l'eau pour mouiller le tout et mettre sur feu moyen jusqu'à caramélisation. Avant de servir, aupoudrez le gâteau refroidi de sucre glace, ajoutez les zestes et le jus caramélisé et râpez des copeaux de chocolat noir au-dessus. Terminez en posant au milieu le sarment cassé en 2 ou 3 morceaux.

VERSION CITRON

ingrédients de base

Les mêmes, moins les oranges.
2 citrons non traités
un petit pot de confiture d'abricot ou de marmela de d'orange

Procédez de même en remplaçant les oranges par 2 citrons. Versez dans la pâte le jus et les zestes des citrons. Une fois le gâteau démoulé, coupez-le en deux transversalement et fourrez-le de confiture. Reposez le dessus et faites la décoration une fois que le gâteau a refroidi.

Pour la décoration

1 troisième citron
1mandarine
30 g de sucre glace
1 sarment du Médoc
1 bonbon au chocolat fourré au cognac
quelques cuillers à soupe de la confiture utilisée pour le fourrage

Coupez le troisième citron en rondelles et faites-les revenir dans un sirop jusqu'à caramélisation. Passez une légère couche de confiture sur le dessus du gâteau, saupoudrez-le de sucre glace, disposez les rondelles de citron et les quartiers de mandarine, percez le bonbon avec un couteau, versez le cognac qu'il contient en le répartissant en pluie au dessus des fruits, puis râpez le chocolat du bonbon vide en copeaux ou en petits morceaux. terminez en posant le sarment du médoc au centre, coupé en 2 ou 3 tronçons.

Remarque

Ce gâteau est encore meilleur que le précédent à mon goût. La version simple, sans décoration ni fourrage, se suffit déjà à elle-même. Pour la décoration, ne restez pas prisonnier des conseils, innovez avec ce que vous avez sous la main (fruits secs et confits, confitures, bonbons, chocolats...) en respectant les assocations de goût que vous aimez. Ici, par exemple, la note chocolatée doit rester discrète, et peut être accentuée dans le mariage avec l'orange.
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